|
Du mois d'Octobre 1980 au mois d'Avril 1996 paraissait dans le journal du Club un monument de la littérature Française , qui allait bouleverser la France et tenir en haleine des millions de lecteurs .
C'est ce feuilleton , traduit dans 57 langues , que nous vous proposons de retrouver ici , dans sa version d'origine .
LES AVENTURES DE JEAN-MICHEL LAFLECHE
|
1er épisode |
Jean-Michel
Laflèche avait passé une nuit agitée. Certes, à 28 ans , il en avait vu de
toutes les couleurs sur les nombreux terrains de football qu'il avait foulé de ses
crampons , mais c'était quand même la première fois qu'il allait disputer avec
son club , ce Sporting qu'il aimait par dessus tout, la finale de la promotion
d'honneur A , contre l'Entente de Tritouilly-sur-Huveaune.
Il en avait révé des
dizaines de fois de cette finale. Un jour , il gagnait par un score fleuve , le
lendemain l'épreuve se terminait aux penalties et même , une fois, il marquait
un prodigieux coup de boule ( lui qui n'avait qu'un jeu de tête moyen ) , le
but de la victoire, à la 90ème minute ! Il avait passé une partie de la soirée
à cirer ses chaussures, à visser les crampons, à vérifier si son sac de sport
contenait bien ses chaussettes bleues un peu délavées, certes, mais qui étaient
plus qu'un souvenir pour lui, une véritable relique , car elles lui avaient été
offertes par l'ailier de l' O.M , Roger Magnusson , à la fin du match de Coupe
d'Europe , contre l'Ajax d'Amsterdam. Ces chaussettes là , il les conservait
pieusement et ne les portait qu'en de très rares occasions , la dernière en
date étant la finale de la 5ème Division qu'il avait gagnée avec ses copains ,
il y a trois ans déjà , contre Eoures-les- Babouins.
Jean-Michel , après un
copieux petit déjeuner se rendit au siège du club , serra de nombreuses mains
de supporters... et de supportrices qui contribuèrent grandement à le motiver
encore un peu plus pour le match de l'après-midi. Il parla un peu tactique avec
ses partenaires et l'entraîneur et se reposa jusqu'à l'heure du rendez-vous. A
14 heures, le stade était déjà plein , des banderoles bleues et blanches
s'étalaient fièrement sur les gradins , quelques trompettes , dans lesquelles
des gamins s'époumonaient fournissaient l'ambiance sonore. Des discussions
vantant les mérites de l'un ou les lacunes de l'autre , fusaient entre les
groupes joyeux et colorés qui faisaient autour du stade comme une ceinture de
fleurs.
Jean-Michel
et ses camarades , après avoir humé l'atmosphère se rendirent au vestiaire pour
revêtir leurs maillots à damiers , écouter les dernières consignes du coach et
procéder au rituel massage d'huile camphrée.
Et c'est alors que tout parut
s'écrouler autour de Jean-Michel Laflèche , notre héros . Un gouffre sans fond
venait de s'ouvrir sous ses pieds, ses mollets se mirent à trembler , il fut
obligé de s'asseoir, ses jambes pantelantes n'étant plus en mesure de le
soutenir. Après avoir enfilé son maillot et sa culotte blanche, où un numéro 11
dressait fièrement ses barres , il avait plongé la main dans son sac de sport
pour prendre ses chaussettes et ne les avait pas trouvé. Angoissé à l'extrême ,
il avait alors renversé le sac sur le sol , espérant que les bas tomberaient
d'un quelconque recoin , mais non , il fut bien vite obligé de se rendre à
l'évidence , quelqu'un lui avait volé ses chaussettes fétiches. Pascal Margiano
, le responsable du matériel essaya bien de le consoler , lui donna une paire
de bas tout neufs , mais rien n'y fit.
Les dirigeants du Sporting ne s'y
trompèrent point , Jean-Michel Laflèche , privé de ses bas magiques , tel
Samson sans ses cheveux, était un autre homme . A la vérité , c'était un joueur
désemparé , un pantin sans ressort et sans âme.
Tout se déroula alors très
rapidement. L'arbitre appela les deux capitaines pour le contrôle des licences
, leur fit ses dernières recomrnandations : " Messieurs , jouez au ballon...
Attendez le coup de sifflet... Si je vous entends parler , carton jaune "... . Il
était 15 heures précises , un coup de sifflet strident donna le signal du début
de la rencontre.
Dès le début de la partie , le Sporting fut balloté et dominé
dans tous les compartiments du jeu. L'aiguille des minutes n'avait pas achevé
son cinquième tour que le score était déjà ouvert , et la demi-heure atteinte
voyait ce même score aggravé d'une nouvelle unité ! Un silence impressionnant régnait
sur les gradins. La foule muette de stupeur , les dirigeants , les jeunes du
club , des poussins aux cadets étaient bien obligés de constater que le
Sporting , tout en étant numériquement au complet sur le terrain jouait en
réalité à 10. Sa force de frappe , son ailier de charme , si précieux
d'habitude , n'était plus qu'un fantôme traînant lamentablement son ombre et ,
comme on le dit vulgairement au coin des buvettes , il ne touchait pas sa
canette. Un grand soupir s'éleva de la foule lorsque la mi-temps fut atteinte.
Le Sporting était mené 3 à 0. Les joueurs rentrèrent la tête basse au vestiaire
où flottait un silence de cathédrale. A vrai dire , la seule question que l'on
pouvait se poser était la suivante : A combien allait se monter l'addition , 6
, 7 , peut-étre 8 à 0 ! Quelle humiliation en perspective !
Le président du
Sporting , Jacques Boulet , blotti dans un coin , n'en croyait pas ses yeux.
Qu'avait-on fait à son équipe , si
homogène d'ordinaire , au jeu collectif
posé , à la défense hermétique. Les 10 minutes de repos parurent durer un
siècle. A la reprise, une timide attaque des joueurs à damiers put faire croire
qu'un dernier sursaut pouvait permettre à l'équipe de remonter ; mais non ,
c'était le chant du cygne, la domination de l'équipe adverse se fit plus
pressante encore.
Toutefois, le score se stabilisa à 3 à 0. Il ne restait plus
que 25 minutes à jouer. Un grand cri , un cri inhumain fit tourner la tête à
tous les spectateurs. A l'autre bout du stade , très loin de l'action alors en
cours , c'était notre héros qui venait de pousser ce hurlement déchirant. Un
deuxième cri de bête féroce glaça la foule de terreur. Jean-Michel Laflèche ,
comme un fou , se précipita hors du terrain et fonça vers le fond du stade ,
tel un aigle sur sa proie. Le Sporting jouait à 10. L'entraîneur décida que
cela ne pouvait plus durer et fit s'échauffer le douzième homme. Des cris , des
vociférations , des bruits de lutte provenaient à ce moment de l'endroit vers
lequel s'était précipité Jean-Michel. Les spectateurs n'avaient plus d'yeux que
pour ce qui se passait à l'autre bout du stade...
Pourquoi Jean-Michel Laflèche
est il sorti si précipitamment du terrain ? Quels sont ces bruits de bagarre ,
que se passe-t-il au fond du stade ? Le Sporting encaissera-t-il un carton ?
C'est ce que vous saurez en lisant le deuxième épisode de notre passionnant
feuilleton : Les aventures de Jean-Michel Laflèche ou l'ailier miracle .
Note de l'auteur : Toute ressemblance avec des personnages existants ou ayant existés serait une coïncidence voulue.
Tous droits réservés. M. M.